Le gagnant emporte tout : le retard irrémédiable de la Chine dans l’industrie des semi-conducteurs.

“Le 16 mai 2019, Donald Trump place Huawei sur la liste rouge (l’Entity List) des exports américains. Cette décision signifie qu’à partir de cette date, n’importe quel produit fabriqué par n’importe quelle entreprise de la planète doit déclarer avoir moins de 25 % de technologie américaine pour pouvoir être vendu à Huawei. L’épée de Damoclès vacille au-dessus de la firme de Shenzhen…”

Nina Xiang

Je suis récemment tombé sur un post LinkedIn de Nina Xiang, fondatrice du China Money Network, parlant de son dernier livre : US-China Tech War : “What Chinese tech history reveals about future tech rivalry”. Le sujet de la guerre technologique entre les USA et la Chine est plus que d’actualité et j’ai pensé que cela serait une bonne lecture pour approfondir le sujet et en cerner les enjeux.

US China Tech War Nina Xiang

Ce livre parle d’histoire, d’économie et de politique. Mais le point central, c’est l’industrie des semi-conducteurs. Ces minuscules composants électroniques qui composent l’entièreté de nos appareils tech aujourd’hui. Malgré les grandes avancées de la Chine ces deux dernières décennies, le pays dépend encore de l’étranger pour se fournir en semi-conducteurs haut de gamme… Pourquoi ?

La raison réside dans une théorie économique des années 60. En effet, la Chine a raté une fenêtre de tir cruciale à la fin du XXe Siècle, qui aurait complètement changé la donne. Cette théorie, c’est la loi de Moore, et je vais en parler dans ce résumé.

Les semi-conducteurs… C’est l’or du XXIe Siècle, qui les contrôle, contrôle le monde.

Je vous offre dans cette première “Book Note” les clés de compréhension historiques, par Nina Xiang, des tensions technologiques actuelles entre les deux plus grandes puissances mondiales, et ce que le futur nous réserve.

L’ADN technologique chinois

Tout au long de son histoire, la force de la Chine a été sa capacité d’application de la technologie à la vie courante.

En Chine, durant les différentes dynasties qui l’ont dirigée, la science et la technologie faisaient partie de l’appareil d’état. Ces disciplines étaient considérées utiles si elles servaient à améliorer l’économie, le fonctionnement administratif et le niveau de vie.

De ce fait, les scientifiques étaient des fonctionnaires, travaillant dans un esprit très pragmatique. Les scientifiques et ingénieurs chinois d’avant le 20e Siècle se concentraient sur la praticité et la fonctionnalité des choses, mais pas forcemment sur le raisonnement par “principes premiers” (les raisons fondamentales pour lesquelles des phénomènes se produisent).

Cette priorité donnée à la constante amélioration du fonctionnement étatique à donnée à la Chine impériale le système administratif le plus avancé de la planète, bien avant les Européens.

Mais ce focus sur l’application de la technologie à la vie courante ne laissait peu de place à la recherche pure, fondamentale.

En Chine, l’exploration des mystères de la nature n’était pas une priorité. Car le Bouddhisme, Confucianisme, et le Daoisme encadraient déjà les concepts de la relation entre la nature et l’homme. Nul besoin de les questionner donc. Par exemple, étudier l’astronomie ne servait pas à comprendre les lois physiques de l’univers, mais à concevoir des calendriers religieux.

Un exemple parlant de la force des traditions religieuses dans la science en Chine est l’histoire de l’empereur Kangxi.

Ce dernier recevait de nombreux missionnaires religieux européens qui rapportaient des objets technologiques pour capter l’intérêt de la cour de l’empereur, gagner sa confiance et répandre le catholicisme en Chine. Kangxi, féru de ces objets technologiquement avancées a même créé un laboratoire dans la Cité Interdite.

Source : Wikipedia, Astronomes jésuites avec l’empereur Kangxi (1690-1705)

Mais malgré ce flux constant de donations, l’empereur n’a jamais osé passer outre les traditions et lancer un courant de révolution scientifique en Chine. Nombre de ces objets ont été retrouvés des décennies plus tard, prenant la poussière dans une réserve de la Cité Interdite.

Le retard technologique c’est accentué par la suite avec les deux Guerres de l’Opium perdues. Et voyant le déficit militaire dont l’empire faisait défaut, la notion d’apprentissage de la technologie occidentale s’est faite bien plus urgente.

C’est à la fin du 19e Siècle que la dynastie Qing développe ses premiers prototypes de bateau à moteur. La plupart d’entre eux seront un échec, et l’apprentissage est lent. Zeng Guofan, le Grand Secrétaire d’Etat décide alors d’engager directement des étrangers pour concevoir des usines en Chine.

En 1965, le Jiangnan Machinery Manufacture Bureau est né, la première Joint-Venture Sino-Européenne. Elle marque le début de la politique du “self-strenghening movement”, période de rattrapage technologique importante.

Il faudra attendre la révolution de 1911 et la chute de la dernière dynastie en Chine pour voir un mouvement “pro-science” émerger.

C’est l’époque à laquelle les premiers scientifiques, chercheurs et techniciens de métier sont apparus en Chine, avec des universités, institutions de recherche, et des entreprises privées pour que les ingénieurs exercent leurs talents.

Un exemple parlant, en 1935, la China-Italy Aircraft Manufacturing Factory est créée à Nanchang (Jiangxi) avec 25 % de l’investissement par le gouvernement chinois et 75 % par la banque de Naples. Ces expérimentations ne dureront malheureusement pas, obstruées par la guerre civile entre Nationalistes en Communistes après la 2e Guerre Mondiale.

Les Joint-Venture feront à nouveau leur apparition 50 ans après, lorsque la Chine s’ouvre à nouveau au monde.

Des décennies de guerre civile ont fait rater à la Chine de nombreuses fenêtres d’opportunité technologiques pendant les deux guerres mondiales. Il aura fallu attendre les années 80 pour voir la Chine réintégrer l’économie mondiale, et opérer le plus spectaculaire rattrapage économique de l’histoire.

L’histoire de l’industrie des semi-conducteurs en Chine

L’histoire de la Chine et son rapport à la technologie nous permet de comprendre les évolutions récentes dans son économie.

Le développement technologique crucial du 20e siècle dans le monde… c’est les semi-conducteurs. L’invention vient des Etats-Unis, avec trois noms à retenir :

  • En 1947 : John Berdeen et Walter Brattain des laboratoires Bell conçoivent le “point-contact transistor.”
  • En 1948 : Willian Shockley conçoit le transistor à jonction.

Ces réalisations technologiques vont changer le monde. Ils recevront tous le prix Nobel, et cette étape lancera l’ère de l’information telle qu’on la connaît aujourd’hui.

Pendant ce temps, la terrible guerre civile fait rage entre les Nationalistes et les Communistes dans l’Empire du Milieu.

Pré-1980

Lorsque Mao prend le pouvoir et établit la République Populaire de Chine en 1949, tout va très vite.

Le système d’économie planifiée est instauré deux ans après 1949, d’après le modèle soviétique des « Five Year Plan ». En 1956, reconnaissant l’importance de la technologie moderne pour le pays, la Chine lance un « 12 year Technology Plan » avec un focus sur 6 technologies :

  • La bombe atomique
  • Les missiles
  • L’informatique
  • Les semi-conducteurs
  • L’automatisation
  • La radio

Un groupe de scientifiques chinois se forme alors à Beijing au début des années 50 dans le but de travailler sur cette nouvelle technologie des semi-conducteurs. La Chinese Academy of Science (CAS) est créée.

Après des décennies de retard en recherche scientifique, le gouvernement chinois a compris que le transfert de talent était la méthode la plus efficace pour obtenir de la technologie rapidement. Cette stratégie à permis à la Chine de ne pas accuser un si gros retard dans l’électronique, notamment grâce à ses nombreux talents instruits à l’étranger.

La production des premiers semi-conducteurs basiques sur le sol chinois à permis au pays d’établir des avancées techs très importantes, comme le premier ordinateur “made in china” en 1958, développé par l’Institut d’ingénierie militaire de l’université de Harbin (province du Heilongjiang).

Mais l’épisode du “Grand Bond En Avant” à entraîné une période de stagnation pour les semi-conducteurs. Avec un blocage total pendant la révolution culturelle entre 1966 et 1976.

Alors que la Chine est à l’arrêt, n’ayant pas les ressources financières nécessaires pour continuer à développer l’industrie, le Japon, Taiwan, et la Corée du Sud prennent de l’avance dans la conception-fabrication des semi-conducteurs.

Une théorie économique à permis de prévoir un doublement de la puissance de calcul informatique annuel dans l’industrie des semi-conducteurs. Ce phénomène, c’est la Loi de Moore.

Source : wikipedia, croissance du nombre de transistors dans les microprocesseurs Intel depuis 1970

Le problème pour la Chine, c’est que chaque année de retard pris sur la recherche et developpement de l’industrie des semi-conducteurs constitue un défi de plus en plus difficile à rattraper. Alors que les firmes américaines doublent leur puissance de calcul tout les ans, la Chine doit faire exponentiellement plus d’efforts avec le temps.

Même avec l’appui politique du gouvernement, il n’y avait pas en Chine d’économie de marché fonctionnelle qui aurait permis de fournir l’équipement, les matériaux, et la demande nécessaire à son développement.

La situation changera progressivement à la fin des années 70, avec l’entrée au pouvoir de Deng Xiaoping et l’arrivée de la Chine aux Nations Unies.

1980-2000

L’acteur principal de la fabrication de semi-conducteurs en Asie à la fin du 20e siècle… C’est Taiwan.

Morris Chang, né à Ningbo en République de Chine (l’ancien nom de la Chine avant la prise de pouvoir de Mao en 1949) en 1931 et installé à Taiwan, se rend compte que peu de sociétés de semi-conducteurs se concentraient sur la production industrielle, en grande quantité, de ces derniers.

Il créait alors TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Company) en 1987, entreprise que les amateurs de marchés boursiers connaissent tous aujourd’hui.

Source : Sam Yeh / AFP, le siège de TSMC à Hsinchu

TSMC, se concentrant sur la production plutôt que la conception de circuits imprimés, réussit son pari. Avec une croissance à double chiffre pendant trois décennies, et des partenariats avec les grandes firmes américaines lors du “tech-boom” des années 2000.

L’entreprise devient leader incontesté du secteur et produit aujourd’hui plus de 53% des semi-conducteurs sur la planète.

L’histoire du continent est moins glorieuse, mais prendra une direction différente.

En 1977, il y avait plus de 600 entreprises de semi-conducteurs en Chine, mais toutes très petites et arriérées technologiquement. La Chine se rend compte de son retard dans le domaine et décide d’agir. En 1982, le China State Concil crée un nouveau plan de développement pour les circuits imprimés dans le but de rattraper le retard avec les autres nations, avec plus de liberté de marché. Depuis cette date, beaucoup d’entreprises chinoises ont commencé à importer de la tech étrangère. Mais ces imports n’ont pas eu le succès escompté, et très peu d’entre elles ont survécues.

En 1986, Beijing lance le 7e “Five-Year Plan” pour l’industrie des semi-conducteurs.

Le véhicule principal de ce plan quinquennal : le “Projet 908”, avec un budget de 2 milliards de Yuan (31 milliards de Dollars US aujourd’hui) dans le but de construire des lignes de productions capables de constituer 12 000 circuits imprimés de 0,8 à 1,2 microns par mois.

Au même moment, TSMC produisait 88 000 circuits par mois, de précision bien supérieure. La société représentant ce projet se nommait “Wuxi Huajiang Electronics”, malgré le fait qu’elle soit loin derrière les leaders du marché, l’avancée pour la Chine continentale était énorme.

Malheureusement, le projet 908 a été un échec cuisant, atteignant au meilleur 800 circuits imprimés produits par mois.

Pendant ce temps, la Loi de Moore faisait son travail, et le Japonnais Nec, l’Américain AMC, et le Taïwanais TSMC continuaient leurs avancées fulgurantes.

Les résultats catastrophiques du projet 908 montrent l’échec du modèle de l’économie planifiée et la longue courbe d’apprentissage que le gouvernement communiste devait faire face pour sa transition vers une économie de marché.

“Lesson learned”.

Un deuxième essai, le “Projet 909” voit le jour à l’approche de l’an 2000. Ce projet prend forme sous le nom de Shanghai Huahong Microelectronics Co., Ltd., avec 4 milliards de Yuan de budget, plus de liberté, et un partenariat avec NEC. L’entreprise fait profit en l’an 2000 avec 20,000 circuits par mois et des précisions de 350 à 240 nm, de plus en plus proche des autres pays.

Mais l’entreprise ne survivra pas au “dot-com boom” de 2001.

Lors de ce revers économique, on constate que le procédé d’apprentissage via Joint-Venture n’a pas fonctionné, la société n’a pas su garder les savoirs et à terminé sa vie à concevoir des puces de mauvaise qualité et quelques brevets peu utiles.

Les années 1980-2000 sont une période d’essai et d’apprentissage pour l’industrie des semi-conducteurs en Chine.

En 1994, la part de marché des circuits imprimés chinois dans le monde est de 0,3 %, la technologie ayant des décennies de retard sur les autres pays. La Chine perdait ses talents et n’en produisait pas pendant la période. Les jeunes partaient travailler aux USA, car la paie en Chine était dérisoire et les entreprises de semi-conducteurs tombaient comme des mouches.

De plus, les projets d’usine étaient considérés comme des campagnes politiques et non des idées de business viable. Les élus locaux s’intéressaient au projet, car cela lançait leurs carrières politiques. Le support gouvernemental était structuré différemment. Le gouvernement approuvait le budget et l’injectait dans le capital de l’entreprise. Tout était calculé sur des objectifs fixes sans prendre en compte les dynamiques et besoins du marché. Les objectifs ne se basaient pas sur la R&D, mais sur des objectifs de production mensuels arbitraires.

Cependant, la Chine n’a pas tout raté à cette période.

Le problème avec la Loi de Moore, c’est que si vous prenez du retard, il est chaque année deux fois plus difficile de rattraper l’avance des leaders du marché. Voyant la difficulté de rattraper son retard en semi-conducteurs, le pays, c’est concentré sur l’achat de circuits imprimés, et surtout… L’électronique bon marché.

Source : Wikipedia/Our World In Data, évolution du nombre de transistors sur les semi-conducteurs depuis 1970.

Dans les années 90, le marché de l’électronique a explosé en Chine.

De 2,5 millions de TV produites en 1980 à 49 millions en 1999 (x 19,6), même croissance fulgurante pour les réfrigérateurs, climatiseurs, machines à laver, etc. La production de PC a augmenté de +35 % à cette période, avec une valeur ajoutée en 2005 de 408 fois celle de 1985 ! Une part de marché qui bondit de 0,5 % en 1985 à 46 % des PC en 2005.

Forte de son succès sur ce marché, les supply chain mondiales ont commencé à se concentrer en Chine pour profiter de cet électronique bon marché.

Une bataille sur le marché intérieur faisait rage entre les américains IBM, AST et Compaq et les chinois de Legend (Lenovo), Founder, Hisense, et Great Wall. Et les entreprises chinoises ont emmagasiné beaucoup d’expérience pendant cette période de forte compétition commerciale.

Post-2000 : une nouvelle ère, de nouveaux défis

Le nouveau millénaire marque l’émergence d’entreprises de semi-conducteurs privées créées par des talents chinois formés à l’étranger.

À partir de 2000, Beijing reconnaît son retard dans les SMC et oriente ses politiques publiques sur le développement de software plutôt que sur la production de SMC. L’état créé un fond spécial pour soutenir la recherche sur les logiciels, et envoie les talents étudier à l’étranger, tout en engageant des experts américains et japonais sur son sol.

Le focus de l’industrie passe de la production industrielle au design et conception, bien moins coûteuse.

La politique industrielle de l’an 2000 offre des réductions d’impôts pour l’importation de circuits et puces fabriquées à l’étranger, mais conçues en Chine et qui ne peuvent être fabriquées sur place.

En 2004, les US rapportent à l’OMC les pratiques chinoises de concurrence déloyale. La dispute est résolue diplomatiquement. (cela se faisait encore à l’époque.)

Pour lire la Chine, il faut lire les changements sémantiques dans ses communiqués officiels.

Le 11e “Five Year Plan” de 2006 à 2010 est changé en “Five Year Guidelines” montrant le rôle de plus en plus important des mécaniques de marché dans l’économie chinoise et la moindre intervention de l’état.

Source : State Council of China, Guidelines of the Eleventh Five-Year Plan for National
Economic and Social Development (2006-20010)

Désormais, les politiques industrielles sur les semi-conducteurs incluent :

  • Financements facilités
  • Baisses d’impôts
  • Financement de R&D
  • Traitement administratif simplifié
  • Subventions sur l’éducation et la formation de talents

La taille du marché des SMC en Chine est passée de 56,16 milliards de RMB en 2002 à 281,43 milliards en 2011. Une croissance annuelle de 19,61 %.

Mais les chiffres continuent d’impressionner : sur le marché mondial, aussi, la part de marché chinoise passe de 4,81 % en 2002 à 14,5 % en 2011. Les entreprises chinoises, maintenant intégrées au marché mondial, ont progressé technologiquement, avec 18 lignes de production en 2002 à 66 en 2011.

(Attention à ces chiffres, car l’industrie faisait face à de nombreuses difficultés, le chiffres comptent aussi les entreprises étrangères sur le sol chinois et ne représentent pas réellement l’industrie 100% made in China)

La chose à retenir : durant le 9e five year plan (1996-2000), les IDE comptaient pour la moitié de l’investissement des circuits imprimés en Chine. La croissance de l’industrie chinoise de SMC était en fait en gros le fruit de la migration des leaders des SMC sur le sol chinois.

Avec le temps, la dépendance aux entités et talents étrangers pour la production de SMC n’a cessé de s’intensifier.

Le déficit commercial sur les produits SMC passant de 24,78 milliards de dollars en 2002 à 121,47 milliards de $ en 2011. En 2010, seulement 10 % des SMC du marché chinois étaient produits par des productions locales et entreprises chinoises. La Chine ne pouvait produire qu’un quantité critique de puces nécessaires pour sa consommation locale… Représentant une vulnérabilité critique.

De son côté, l’industrie de l’électronique chinoise continue son avancée flamboyante, mais reste très dépendante des SMC étrangers.

Autre vulnérabilité : les sociétés chinoises ont toujours de décennies de retard, et notamment sur la supply chain des matériaux nécessaires à la production de ces SMC (la Loi de Moore faisant son effet) pendant ce temps la compétition est devenue très efficace dans le sourcing et l’acheminement de matériaux.

Malgré les efforts du gouvernement, peu d’avancées significatives ont été faites dans le domaine des SMC, et cette dépendance deviendra l’un des grands puzzles a résoudre pour Beijing, encore aujourd’hui.

Source : Bloomberg, chips are hard to make and that’s the problem (2021)

Désormais, la miniaturisation et la Loi de Moore font qu’il est presque impossible de rattraper les leaders du marché des SMC, tels que TSMC, Intel et Samsung.

C’est une industrie où le gagnant emporte tout.

En 2020, Huawei perd l'accès à la production de SMC avancés chez TSMC. Beaucoup de gens se sont demandés pourquoi Huawei n'a pas tenté de produire ses puces plus tôt, la réalité est que cela aurait été tout simplement impossible. Huawei n'avait pas l'argent en 2010 pour poursuivre la quête du semi-conducteur, avec des revenus plus importants, mais des marges beaucoup plus petites que TSMC, empêchant l'entreprise d'investir dans le chantier SMC (12,8 % de marge contre 38,5 %). Les calculs d'entrée dans la production de SMC étaient irréalisables pour Huawei.

De 2005 à 2010, on constate que le gouvernement chinois abandonne l’idée de rattraper son retard dans la production de SMC, et se concentre sur la conception et design de SMC.

Désormais, la délocalisation et délégation de la production sont évidentes.

En résultat, l’industrie de la conception de SMC s’est fortement développée de 2001 à 2011 avec une croissance moyenne annuelle de 52,3% (plug alibaba et huawei self developped chips). Certaines des entreprises de conception de SMC sont devenues leaders comme la HiSilicon de Huawei et Spreadtrum Communications (top 25 mondial)

Le fait qui montre tout, Pékin n’a pas investi un sou dans la production de SMC entre 2000 et 2009, un signal que l’état à laissé tomber ce sujet pour se concentrer ailleurs.

Par la suite, les USA ont relâché les barrières à l’import de produits tech en chine, constituant le début de la supply chain mondiale des produits hi-tech que l’on connait aujourd’hui, notamment via Shenzhen et la province du Guangdong.

L’épisode des tariffs américains

Pendant de nombreuses années, le gouvernement américain à volontairement gardé la Chine à au moins deux générations de retard dans cette industrie de haute-pointe. Les tariff américains ont continués à garder le leader emergent chinois SMIC à bonne distance en le laissant produire des semi-conducteurs bas de gamme ou moins avancés et en protégeant le savoir et la propriété intellectuelle chez Intel et TSMC.

Pareillement pour Huawei, développant sa Huawei HiSilicon, qui à du se défaire de l’administration Trump.

Le président américain place le géant chinois sur la fameuse “entity list” le 16 Mai 2019. L’objectif est de garder l’accès à la technologie américaine loin de Huawei.

L’exemple le plus flagrant de ce decret énonce que n’importe quel produit fabriqué par n’importe quelle entreprise de la planète devait déclarer avoir moins de 25% de tech américaine pour pouvoir être vendue à Huawei. Placant ainsi Intel, Qualcomm et d’autres hors-jeu. Seul TSMC, produisant 90% sur place à Taiwan avec sa propre propriété intellectuelle à continué à fournir Huawei en SMC.

L’épée de Damocles sur la tech chinoise.

Source : DW, Trump VS Huawei (2019)

Une guerre sans gagnants

Avant, la supply chain de création, conception, et production des semi-conducteurs était plutôt mondialisée et efficace.

Désormais, on observe un découplage entre les USA et la Chine. Cette division à pour effet de détruire des décennies d’efforts.

La crise du COVID-19 a accentué le fait que tout les états sont dépendants de cette supply chain globale. Le manque de puces et SMC à provoqué des pénuries et arrêts de production partout dans le monde (episode des playsation), automobile, téléphonie, informatique…

Désormais, les USA, l’Europe et l’Asie se battent tous pour avoir la capacité de produire ses fameux SMC sur leur sol pour diminuer leur dépendance aux autres.

  • L’Union Européenne veut doubler sa production pour atteindre 20% de parts de marché mondiale.
  • Les USA allouent 52 milliards de dollars pour la recherche sur les SMC, le design et la production (Juin 2021 : US Innovation Fund)
  • La Chine donne l’objectif de produire assez de SMC pour répondre à 70% de sa demande nationale… des chiffres qui semblent peu réalistes.

Encore une fois, les politiques semblent donner des objectifs déconnectés de la réalité car ils ont peu d’experience dans le domaine. On peut citer à nouveau l’exemple de Chine qui malgré des décennies de politiques publiques allouées aux SMC, n’a toujours pas réussie à rattraper son retard.

Tout les pays concernés ont tenté des politiques publiques similaires et les résultats ont été bien différents. L’efficacité des tax cut et incentives sur la capacité à developper sa R&D est encore en débat.

Dans le cas de la Chine, les politique de support industrielles n’ont certainement pas marché de manière optimales.

  • La Chine n’a pas réussie à outrepasser le blocus tech occidental
  • Problème évident de timing, la Chine a ratée des fenêtres de tir capitales dans son developpement technologique au 20ème Siècle.
  • Les subventions du gov chinois n’ont pas servi à pousser l’innovation mais plutot à garder en vie des entreprises zombies et on poussé ces dernière à effectuer des guerres de prix vers le bas, avec de l’argent publique. (sur les 30 plus grandes entrprises SMC chinoises en 2017, 8 recevaient des subventions égales à 50% de leurs revenus, et 5 ont reçues des subvention superieures à leur profit total…)
  • L’argent a servi à faire la guerre des prix vers le bas car la production chinoise de SMC etait bas de gamme avec des consommateurs très sensibles aux prix.
  • Il n’y avait pas de performance metrics pour mesurer la reussite des projets de R&D

La Chine continuera à faire face à de nombreux défis.

Un fond spécial, le National Integrated Circuits Industry Development Investment Fund, est montré comme objet politique pour montrer à quel point la Chine relance ses investissements dans les SMC récemment. Mais l’allocation des fonds est bien trop dispersée avec 53 milliards de dollars sur 12 entreprises.

En Comparaison, Intel seul à investi 13,6 millards de dollars sur la R&D en 2020. La Chine donne également l’objectif pour les SMC chinois d’être leader du marché en 2030.

Source : Bain & Company, sites de production de semi-conducteurs en Chine (2016)

Mais le pays ne semble pas avoir appris de ses échec précédents… il n’y a pas de “grand bon en avant” dans les semi-conducteurs.

Le pays fera face à d’importants défis mais il y a des points positifs :

Beijing est décidé de limiter sa dépendance à la technologie américaine et se dégager de l’emprise de son Epee de Damocles. Le pays attire de plus en plus de talents grâce à son marché graduellement plus attractif. Ce dernier représente le plus grand du monde (en consommation de SMC) depuis 2005 avec l’Asie-Pacifique qui représente 68,1% des parts de marché de SMC en 2025.

Le marché SMC chinois va encore être très vulnérable face aux US pendant 10 ans au moins, et le progrès dans la production des SMC va prendre plus de temps que la Chine ne le prévoit.

Si l’on regarde sur 20-30 ans il y a plus de chances que la Chine rattrape son retard, mais c’est difficile à dire.

Dans le futur, les deux puissances ont de grandes chances d’être de grandes puissances technologiques, avec des avantages et faiblesses différentes.

Il faut se rappeler que tout n’est pas blanc ou noir, et le deux peuvent coexister.

Les progrès technologiques de la Chine durant les 40 dernières années sont basées sur le fait que l’état à graduellement retiré la politique de la science et la technologie.

Fait interessant: Avec la seule taille de son marché interieur, la Chine est devenu le seul pays classé “non-démocratique” à être dans le top 30 du Global Innovation Index sur les 10 dernières années.