Dans sa route vers la première place mondiale, allons-nous continuer à ignorer la Chine ?

Avant d’aller en Chine il y a bientôt 10 ans, ma connaissance de ce pays, c’était les usines de chaussures, les défilés militaires et la Grande Muraille… simplement parce que ce sont les sujets qui avaient été traités au journal de 20h. Et je peux vous dire qu’ils s’impriment très vite dans l’imaginaire d’un adolescent comme moi. 

Après y avoir vécu 2 ans, étudié son économie, et avoir raconté mes aventures à tous… je me suis rendu compte d’une chose. 

La Chine, en France, on s’en fout un peu. 

C’est un sujet lointain, qu’on ne comprend pas vraiment, avec une langue bizarre et des dessins à la place des lettres. 

On passe le sujet au second plan, alors que ce pays à une influence immense et insoupçonnée sur nos vies. 

Aujourd’hui la Chine, c’est l’État le plus peuplé de la planète, la 2ème économie mondiale avec une culture riche et ancienne, qui ne peut se résumer à son gouvernement, ses entreprises ou à un quelconque fait divers. 

La Chine n’est plus seulement synonyme de manufacture bon marché, c’est désormais une superpuissance technologique qui a un effet direct sur notre quotidien. 

Le problème, c’est que nous manquons cruellement de personnes capables de nous aider à décrypter l’essence de ce pays et de ses habitants. Capables de distiller la somme gigantesque d’informations sur ce pays pour nous servir l’essentiel, et non le sensationnel. 

Nous avons besoin d’une nouvelle vague de décrypteurs, d’experts, pour comprendre ce pays. Dans toute sa complexité. 

Si certains peuvent voir l’Empire du Milieu comme une menace grandissante, il peut tout autant être une opportunité. Et nous devons en être informés. 

“C’est beau mais c’est loin”

Nous sommes au début de l’année 2012, alors lycéen, j’annonce la nouvelle à mes amis : “je pars 3 semaines en Chine!”. 

Je voyais la surprise sur le visage de mes camarades. Mais que va-t’il donc faire aussi loin, dans ce pays avec lequel on pense être familier, mais dont en vérité on ne sait pas grand chose. 

Moi aussi, dans ma vie d’avant, je ne me suis jamais intéressé à la Chine. 

Le seules représentations que j’ai pu avoir dans ma jeunesse c’était un ou deux films de Jackie Chan, peut-être Tintin au Tibet, les histoires qu’on voyait à la télé, une usine avec des ouvriers qui travaillent à la chaîne, les pandas, le kung-fu, la Cité Interdite… 

Quand on grandit en France, dans un petit village, on n’est jamais vraiment exposé à ce pays si lointain qu’il ne nous concerne pas. 

Pour beaucoup d’entre nous, notre enfance a été bercée d’influences américaines. La musique, les films et les séries, un certain idéal imprégné des Etats-Unis. Mais aussi la culture japonaise bien connu en France, à travers le sport et la culture manga. 

Pour le reste des pays du monde, il est difficile de s’en faire une idée autrement qu’à travers le regard des autres. Comme un professeur, un journaliste ou peut-être un ami. 

Comment nous en vouloir ? Il est impossible de s’intéresser à tous les sujets. Il n’y a pas assez d’heures dans une journée pour cela. 

C’est pour cela que nous nous en remettons à des experts. Pour traduire des sujets complexes, et nous les exprimer de façon plus adaptée : comme les changements politiques en Afghanistan ou la pandémie de Coronavirus. Que nous soyons familier avec le sujet, ou pas. 

Cela place une grande responsabilité entre leurs mains. Et certains experts sont biaisés : comme encore une fois sur le sujet de l’Afghanistan et de la crise du Coronavirus… n’est-ce pas? 

Le monde à besoin d’experts, de décrypteurs. 

Des années après ce premier voyage, je me retrouve souvent dans la situation où l’on me parle de la Chine comme cet objet lointain qui menace. L’angle de traitement de la Chine est celui des médias, qui eux ne parlent que des événements notoires, des manoeuvres militaires ou du régime politique en place. 

Je ne souhaite pas faire de politique dans cet article, car ce n’est pas mon rôle. Un peuple n’est pas son gouvernement. Les hommes sont les hommes, et c’est notre rôle d’apprendre à les découvrir. 

Ce qui m’importe c’est de mieux comprendre cet interlocuteur capital que le monde entier a vu émerger comme étant le plus grand miracle économique de ces derniers siècles. 

Un morceau de Chine dans votre poche

La Chine est beaucoup plus proche de nous que nous le pensons. 

Regardez autour de vous et commencez par votre ordinateur, votre téléphone, télévision et autres appareils électroniques qui peuplent votre foyer. 

Il y a 90% de chances que tous ces objets viennent du même lieu, appelé le Guangdong. 

Le Guangdong est la province (en Chine on parle de province et non de régions) la plus peuplée du pays avec 126 millions d’habitants, soit deux fois la France dans une surface trois fois et demi plus petite. 

C’est la zone géographique que l’on appelle encore aujourd’hui “l’usine du monde”. 

Si l’on prend de la hauteur, on voit que la Chine c’est 1,4 milliards d’âmes, une croissance économique qui oscille entre 5 et 10% en moyenne par an depuis des decénnies, 56 groupes ethniques différents, 13 mégalopoles de plus de 10 millions d’habitants (là où l’Ile-de-France tout entière pèse 12,2 millions d’habitants). 

Des chiffres à faire tourner la tête. 

Comment peut-on ignorer un tel mastodonte et le reléguer au rang de sujet de fin de journal télé, alors qu’il occupe une place si importante dans nos vies. 

On oublie que la Chine a été pendant longtemps une grande puissance. À une époque où la France était le fruit d’une société médiévale où en dehors de l’Eglise régnait une insalubrité et une anarchie certaine, la Chine de la dynastie des Song puis des Yuan était une société organisée administrativement et avancée technologiquement. 

Depuis, la région a maintes fois sombré pour renaître de ses cendres. 

Et désormais, l’axe du monde tend vers l’Asie, où l’essort économique et culturel est si rapide qu’il ne peut plus être ignoré. Comme le dit l’auteur Parag Khanna : “The future is Asian.” 

Une opportunité à peine cachée, réservée aux courageux.

Si la Chine semble être si mystérieuse et parfois effrayante, elle ne renferme pas moins de trésors inestimables. 

Un pays qui reste accessible, malgré les difficultés, mais empli d’opportunités pour ceux qui oseront s’y aventurer.

C’est le miracle économique le plus important que nous ayons connu ces derniers siècles, passant d’un état de pauvreté si important à la seconde puissance mondiale en quelques décennies. 

On ne peut plus l’ignorer. 

Beaucoup d’entre nous n’imaginent pas la mesure des changements qui ont eu lieu la bas. 

Le niveau de vie n’a cessé d’augmenter, et sur certains aspects, beaucoup de chinois aspirent désormais à une vie similaire à la nôtre. 

Vous vous étonnerez peut-être en visitant la Chine d’apercevoir une mère de famille rentrer à la maison après une journée de bureau à bord de sa Audi A4. De voir les jeunes chinois payer leur repas du midi avec leur smartphone. Ou encore une voiture autonome vous livrer votre colis.

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L'évolution de Shanghai, 1920 - 2009 │ Source : Dheera Venkatraman

La Chine continue son développement, et tout va très vite. 

Nous ne devons pas rester passifs et ancrés dans notre méconnaissance de cet “Orient compliqué” comme le soulignait Jean-Pierre Raffarin. 

Certains courageux ont même décidé de prendre le train de cette Chine qui sort des bois. 

Des entreprises françaises ont eu le courage de naviguer dans les eaux tumultueuses de l’Empire du Milieu, comme Carrefour, Peugeot-Citroën et Vuitton. Si certains s’y sont cassés les dents, d’autres ont connu en Chine un succès retentissant. 

De nombreuses personnalités sont porteuses de projets de coopération culturelle entre nos deux états. Avec des partenariats comme le Festival d’Avignon, le Centre Pompidou de Shanghai, les sites archéologiques du Shaanxi ou encore l’intervention d’experts chinois dans l’aide à la reconstruction de Notre-Dame. 

La Chine n’est pas destinée à rester ce lointain objet non-identifié. Car il est déjà présent dans nos vies, et c’est à nous de choisir de le considérer comme un partenaire potentiel, où le laisser dans l’ombre de nos discussions. 

Pourquoi il faut parler avec tout le monde 

Avec le temps, j’ai su construire une autre image de la Chine, de sa culture et de sa société. Tout cela en améliorant la qualité des sources que je consulte, et en variant les experts interrogés, avec des personnalités et parcours divers. 

Mon but est désormais de travailler à offrir une voix supplémentaire en France sur le regard porté à la Chine, à ses habitants, à sa croissance, à son histoire. 

Je compte dédier mes prochaines années à proposer un réel travail de décryptage du pays, à travers d’articles, d’études, de commentaires. Et de vous le distiller de manière simple, compréhensible, actionnable pour que, vous aussi, vous soyez équipés de clés pour réaliser l’importance du sujet. 

C’est avec le temps que l’expertise se construit, et ma responsabilité sera d’offrir une vision juste des choses, pour mieux appréhender cet interlocuteur qui est destiné à prendre de plus en plus de place dans nos vies. 

Si il est vrai que si l’impartialité n’existe pas, la nuance, elle, permet à chacun de construire sa propre image sur un sujet. Je pense que cela doit être l’un des chapeaux porté par l’expert. Et c’est la voie que j’ai décidé d’emprunter, me suivrez-vous ? 

On peut la détester ou l’adorer, mais ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut plus ignorer la Chine.